Voyage dans le temps qui me ramène en l' an de grâce1950. Je suis dans un village de la vallée de l' Ourcq, comme son nom l' indique, où je suis "échoué " par la volonté d' un supérieur, qui a décidé qu' il me serait bon d' aller parfaire mes talents de pédagogue dans un monde très rural.Classe unique, tous les cours, une trentaine d' élèves plutôt sages et attentifs.
Hiver froid. Le poêle de la classe m' a joué des tours, bois d' allumage humide, alors les grands moyens, je verse dans le corps du poêle un grand verre d' alcool à brûler, rien, une minute après j' ouvre le haut du poêle et je me penche pour voir s' il reste une braise et là, je ressens un grand souffle une grande gifle lumineuse et dans une glace je vois un visage, que n' aurait pas renié le dernier des derniers habitants du plus profond de la forêt équatoriale.
je n' ai rien à offrir aux voleurs , après quatre années, où 90% de mon salaire, ridicule, ont été consacrés à ma pension complète (sauf petit-déj) . Ici, mes émoluements de secrétaire de la mairie, suffisent tout juste à payer mes cigarettes dont, à l' époque, je fais très ample usage pour chasser mon stress, et l' essence du petit vélomoteur. Je reviens à mon appartement froid, où un matin, dans le couloir du bas, je dus, pour rejoindre la salle de classe, enjamber un clochard qui dormait là, étendu par terre, deux litres vides à côté de lui expliquant son profond sommeil. A midi, il était parti et dès ce
jour, je résolus de fermer ma porte, le soir à double tour. Mais, attendons la suite...
Quelques jours, après l' incident signalé, réveil anxieux en pleine nuit, des bruits de pas, et même de plusieurs pas, le clochard est revenu, non, j' ai fermé la porte. Et çà se rapproche, c' est dans l' escalier, livide et le coeur à 150, je saute du lit, je prends position dans l' angle opposé à la porte dont je guette l' ouverture, décidé à défendre chèrement ma vie, et puis plus, rien, ils sont partis. Je sors de la chambre, personne, pas de traces. Lendemain, la nuit, ils n' oseront pas revenir, et bien si, ils sont revenus, ma peur est vaincue, je sors, lampe électrique à la main, l' autre munie d' un solide gourdin. Rien. Mystère entier. Matin froid, j' endosse mon manteau bleu tout neuf, qui m' a coûté presque un mois de salaire et ma main passe au travers de ma poche, plus de poche, je vais à ma valise en bois, sans roulette, pour en sortir mes gants faits de laine et je vois sur le dessus, près de la serrure, un trou de 1 ou 2 cm de diamètre, bien rond, tracé au compas, ridicule pour un voleur, débile, elle n' était pas fermée à clé. et je commence à croire à des stupidités de fantômes pas bien dans leurs têtes. . ???
Forte tension nerveuse, la nuit suivante, cette fois c' est l' apothéose, ils marchent dans la chambre. Lumière, et je vois une colonie de loirs qui s' empresse de déguerpir en passant par un trou dans le mur qui permettait à un tuyau de poêle virtuel d' évacuer sa fumée dans une cheminée.
Soulagement, ce n' est que ça. Ce sont de gentilles petites bêtes inoffensives, comme de petits écureuils avec leur queue en panache.
Je résolus de vivre en bonne intelligence avec eux, je m' en accommodai et leur fit même don du reste de mon manteau bleu. Mais attends, l' histoire n' est pas finie. Je reçois une visite, le meilleur ami, vous savez celui à qui on raconte sans retenue aucune, toutes ses petites aventures en échange des siennes. En permission dans son service militaire il s' était empressé de me rejoindre sur son vélo. Petits gâteaux, saucisson sec, une bonne bouteille, peut-être deux car les confidences c' est parfois long, la nuit bien avancée, " je couche où ? " Bonne question comme on dit, je n' y avais pas pensé. Voilà, facile, je descends mon matelas, je le mets par terre pour toi et moi je dors sur le sommier, confort oblige pour l' invité.
Et on dort à poings fermés.
Au milieu de la nuit, je suis réveillé par un hurlement horrible, lumière dans la demi-seconde et je vois un individu hagard, le bras tendu et au bout de ce bras, un loir qu' il tenait dans sa main. Et un énorme rire, me prend encore maintenant, je ne peux l' arrêter.
Hélas, l' ami n' est plus là pour le partager.
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