vendredi 11 juin 2021

Beau village 10

Donc nous sommes en 1951, première année de notre  activité pédagogique dans le village haut juché et première offensive anti-laïque, Lois Marie et Barangé. Nous décidons ausitôt de manifester notre indignation de jeunes esprits libres de tous les dogmes ou diktats aussi bien religieux que politiques, d' en exprimer l' affirmation donc, en perdant une journée de salaire dans une grève dont on se serait bien passé vu l' état maigrichon de notre compte-chèque postal, mais quand on a des convictions, des sacrifices sont nécessaires. Nous disons donc à nos élèves de rester à la maison, ce   qu' ils acceptent volontiers, et nous leur mettons en main, à chacun, sauf une seule pour frères et soeurs, une belle lettre écrite de notre main expliquant nos motivations. Pas de  moyen de reproduction, pas de photocopieur ou de ronéo en ce temps. Non, on a rédigé un brouillon et on l' a recopié une cinquantaine de fois, en s' appliquant pour ne pas être critiqués sur notre écriture ou notre style ou notre orthographe. Oui, il a fallu toute la nuit avec porteur de plume en acier trempée dans l' encrier, Ouf ! Relecture, irréprochable! des modèles ! Beau risque pris dès notre arrivée, pas mieux pour se faire mal voir et se faire considérer comme       ' affreux militants extrémistes . On prend le risque et la crampe de             l' écrivain. Deux ou trois réponses sont reçues, dont un encouragement à continuer dans cette voie et une lettre d' attachement à notre école venue pourtant d' un milieu très religieux  Mais qu' est-ce que l' eau du robinet vient faire là-dedans ? Patience, on y vient tout doucement, on va bientôt la faire couler. Cette loi faite pour aider l' enseignement dit "privé"  mais plutôt privé confessionnel, édictait que l' Etat verserait dorénévant, une somme  (importante) pour chaque élève scolarisé quelle que soit l' école, donc pour le public également, et on vit dans nos établissements arriver une manne divine, on ne savait plus comment employer tout cet argent, les écoles s' équipèrent se modernisèrent, c ' était miraculeux. Chaque trimestre, on dressait une liste de nos élèves et l' argent arrivait dans les caisses de la commune. Après deux années la pluie d' or continua à tomber sur le "privé" et je crois que sur lui, depuis, on n' a pas signalé de sécheresse , mais elle se tarit pour le "public ", c' était à prévoir vu la motivation de ses promoteurs, il fut décidé que les crédits seraient versés au Conseil général mieux à même que nous d' en faire un usage judicieux. Fin, pour nous de l' Eldorado à domicile. Comme j' avais bien pressenti      l' éphémérité de cette richesse, je décidai vite qu' elle apporterait de l' eau à l' école. J' en parlai au Maire avec qui je m' entendais très bien et qui me donna son accord en me laissant le soin du projet.  Comment faire ? Je me livrai à d' intenses réflexions, je questionnai deci-delà espérant que quelqu' un saurait me dire où on pourrait bien trouver de l' eau pour l' amener à l' école et je vis poindre une solution qui me mena comme je l' ai déjà dit vers mon voisin le curé. Allons-y-ensemble.

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