lundi 7 juin 2021
Beau village 14
L' épisode des munitions est terminé, pas d' explosion, pas de
victime, le travail reprend et on arrive sous la fenêtre de la cuisine
pour réunir les évacuations des eaux usées. Là on creuse pour construire
un puisard suffisamment profond. On prend des précautions, sait-on
jamais ? On descend, un mètre, un mètre cinquante et plus, j' entends
qu' on m' appelle. Quoi encore, plus rien ne m' étonne. Regardez ! et je
vois deux squelettes humains qui apparaissent, pas de sarcophage, c'
est plus récent, ils sont là à même la terre. Stupeur. On fait quoi ? Un
article dans le journal, la gendarmerie, les archéologues ? Je suis un
peu las de tous ces aléas - je prends une sage décision - laissez les où
ils sont, on ne peut plus rien pour eux - et faites le puisard un peu
plus loin.,je veux les préserver des eaux usées, c' est stupide,
mais...Installation terminée, l' eau est à l' école. Les enfants lavent
leurs mains avec grand plaisir. Jamais on n' aurait cru que le précieux
liquide serait là un jour, merci monsieur le député Barangé, le maçon
est tout ému de l' intérêt général suscité par cette oeuvre dont il est
le père fondateur, les larmes nous viendraient presque aux yeux Tout
est fini ? Pas tout à fait cependant. Des ennuis collatéraux sont là.
D' abord, j' ai constaté que quand tous les élèves ont utilisé
simultanément les robinets, l' écoulement cesse Je prends la clé du
cadenas, je soulève la plaque du puits et je constate que la crépine
émerge de la nappe. Il faut laisser le puits se remplir. Après quelques
heures, je descends à la cave avec une grosse clé à mollette pour
dévisser les quatre gros boulons de la pompe, entre temps je suis allé à
la source recueillir un plein broc, je remplis la pompe et la
tuyauterie, je remets le courant, c' est bon, pompe réamorcée, l' eau
coule. Simplement à l' avenir je penserai à réguler la
consommation jusqu' à ce qu' une période de sécheresse permette un
creusement plus profond du puits. L' existence est faite de patiences
réitérées, quoique la mienne commence à s' épuiser. Vous ne nous parlez
plus du curé ? Et bien si, je vais en parler. Le curé dispose d' un très
vaste édifice propre à accueillir beaucoup de monde, les repas de noces
même se font là parfois et un jour, je vois apparaître un essaim de
jolies filles venues de Belgique je crois, le curé également est belge
ou d' origine belge, des grandes filles déjà plus qu' ados. Je ne sais
pas s' il s' agit d' une colonie de vacances ou d' un stage de
formation spirituelle, pas d' infos, pas de garçons rien que
des filles et pas quelconques. Le curé vient à ma porte, me déclare que
le presbytère va s' animer et qu' il a besoin d' eau, je serais très
aimable en échange de la bonne volonté qu il a montrée, de laisser ma
porte ouverte. Mais très volontiers, c' est la moindre des
reconnaissances. Bientôt, deux demoiselles se présentent avec chacune
deux grands brocs, leur beau sourire me réjouit le coeur - entrez,
mesdemoiselles, les robinets sont là - Elles puisent, remplissent,
reviennent et me signalent que l' eau ne coule plus. Trajet avec mon
broc jusqu' à la source, je descends à la cave, clé à mollette en mains,
réamorçage de la pompe et retour des demoiselles. Paradoxe, je dois
aller régulièrement à la source sous le regard étonné et parfois
goguenard des villageois - ça ne marche plus les robinets ? - J' essaie
d' expliquer les lois de la physique aux belles néophytes, je leur
indique que si ça ne coule plus elles doivent revenir un peu plus tard
le temps que le puits se remplisse sinon la pompe se désamorce etc...Je
ne sais pas si elles assimilent bien mes cours de physique expérimentale
et je ne veux pas les chagriner en leur exposant toute la peine que j'
ai de devoir démonter et réamorcer la pompe aprés chacune de leur venue
dont je ne voudrais me passer, j' aime les belles filles autant que le
curé les aime. Je crains aussi que le curé imagine une quelconque
mauvaise volonté de ma part, mal venue après tous les services qu' il m'
a rendus. Alors pendant quelques jours, je fais une importante
provision d' eau à la source aux fins de pouvoir réamorcer la pompe, des
dizaines de fois, au risque de voir diminuer l' étanchéité de ce
matériel et de n' avoir plus rien du tout. Stage spirituel fini,
je range ma clé à molette, et je contrôle sévèrement l' ouverture des
robinets. Je suis
excédé. Envoi régulier d' échantillons pour analyse. Et je lis quoi ?
Présence de matières fécales, eau impropre à la consommation, nécessité
de la filtrer, de la désinfecter, eau de Javel ou de la faire bouillir,
cette eau que nous avons consommée, nous et les filles également et même
les écoliers. Anxiété, je me renseigne, aucune intoxication signalée,
soulagement. Je réfléchis, la plaque ne protège certainement pas
suffisamment des infiltrations, que s' est-il passé ? Je vais inspecter
mon puits. Je crois voir, au fond, stupeur, je crois voir des têtes de
crapauds qui émergent de la surface de la nappe, je l' imagine
certainement, pourtant....Retour à la maison en étatd' extrême colère.
Je dévisse les quatre boulons de la pompe, j' enlève le couvercle.
Terminé ! J' abandonne et je reprends comme aux premiers jour mes
trajets à la source où je constate qu' en plus un tas de fumier a été
réinstallé à quelques mètres au-dessus par un éleveur de moutons. Colère
extrême. Je rentre à la maison. C' en est trop, fais tes valises,on
s' en va ! On va où ? La liste des postes vacants est là, on la
consulte, on remplit un formulaire. C' est fini ! fini ! fini !
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