mardi 15 juin 2021

beau village 6

    J' ai rédigé l' acte de décès, comme je l'ai expliqué précédemment, du vannier victime d' une rixe, le médecin légiste a fait son rapport et on sait que la mort est due à de multiples coups de serpettes, aucun doute là - dessus. Maintenant on doit faire toute la lumière sur l' affaire et les interrogatoires commencent. Deux inspecteurs de police ont pris possession de la salle de la mairie, un grand fort, et un  petit maigre qui est le plus actif, en possession de tous les documents et qui semble diriger les opérations. Le  défilé des témoins commence, les hommes, les femmes en grands gémissements, bruyante animation devant la porte de l' école. Je sympathise avec le grand inspecteur débonnaire qui par chance se trouvait à mes côtés quand j' essayai d' expliquer au frère de la victime, un grand fort également, que le permis d' inhumer étant délivré, le corps remis à la famille  ne peut être transporté jusqu' au lieu d inhumation qu' avec un certain nombre de préconisations et formalités, en particulier le cercueil qui doit être comme ci et comme ça...le départ et             l' arrivée du transport etc...et patati et patata... Qu' avais-je dit ! Ces gens sont susceptibles et le grand malabar de vouloir s' en prendre physiquement au secrétaire de mairie, sain et sauf grâce à l' intervention du grand et fort policier qui vite fait calma les ardeurs vindicatives. Je décidai de remettre dans son tiroir tous ces stupides règlements et de me faire oublier... qu' ils fassent selon leurs lois ...je tiens à mon intégrité corporelle.   Donc, grand va-et-vient sur la place de la mairie, en même temps place de l' église, en même temps cour de récréation de l' école et accès au presbytère. Mes élèves ont droit à leur quart d' heure de récréation pendant lequel habituellement je me tiens à l' une des entrées de la place pour une surveillance efficace. Ce jour-là, je me rapproche de la porte de l' école, je sors mon sifflet, fin des ébats dans la cour, je regrette, ils s' amusaient bien,  mais le quart d' heure est passé. Au coup de sifflet, un garçonnet jaillit du côté presbytère avec la vitalité de son âge pendant que la voiture des policiers entre sur la place, les deux trajectoires se rejoignent.
                                                                                                                                            Gros bruit, bris de verre , je me précipite... Apparemment, le garçonnet est intact, peut-être un ou deux bleus, mais la tête a été plus dure que le phare qui est en morceaux sur le sol.    Les policiers rédigent illico leur rapport sans mes observations personnelles, que pourrais-je dire, ils sont assermentés donc leurs considérations sont indiscutables et bien entendu, ils n' ont aucun tort tel que non maîtrise du véhicule, vitesse excessive, manque de prudence ou confiance en soi exagérée. Mon avis leur importe peu, eux savent ..et moi                               ..                                                                                                                                          
Et moi, de  mon côté, je dois faire un rapport détaillé à mon Inspecteur, heure bien sûr, celle de la récréation, coordonnées des lieux, plan détaillé indiquant la position du maître, celle de l' élève, l' endroit exact de  l' accident. Car, pour l' administration, existe-t- il une faute de surveillance, si oui responsabilité du maître, sinon responsabilité de l' Etat et pourquoi pas celle de la commune qui n' a pas su délimiter comme partout un endroit clos . Un jour ou deux passent, l' enfant ne présente aucun trouble, pas de contrôle par un médecin, actuellement il faudrait des examens, des radios, des mises en observation, des cellules avec des psychologues pour évacuer le stress et ses répercussions possibles sur l' avenir mental du blessé, et pourquoi pas un recours contre l' instituteur incapable d' assurer la sécurité des enfants, individu coupable d' un inadmissible défaut de vigilance. Rien de tout ça à l' époque, bonne volonté de la part des parents, l' enfant n' a rien et c ' est tant mieux, on  n' en parle plus. Mon grand inspecteur de police est un peu inquiet  il prend souvent des nouvelles de l' enfant. 

Que pensez-vous qu' il advint ? Quelques semaines s' écoulent et  les parents reçoivent une injonction d'avoir à régler la facture de remplacement d' un phare de véhicule de police, cassé  par leur enfant. Ils se précipitent à l' école. ...Je suis abasourdi.  Je précise cependant que j' avais l' adresse du grand inspecteur sympathique, que je contactai aussitôt et qui autant outré que moi me chargea de dire aux parents de ne pas tenir compte de la facture qu' il règla  aussitôt personnellement.  Et les cours reprirent sereinement  jusqu' au jour où, soudain, dans la cour...

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire